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SOCIÉTÉ Quand les toilettes font peur...

Dernière mise à jour : 20 sept. 2023

Alexandre Vigneault, La Presse




La mise en place de toilettes mixtes pour accueillir les élèves trans dans les écoles a ressurgi à l’Assemblée nationale la semaine dernière, incitant le ministre de l’Éducation à en interdire l’implantation. Un geste qui va à l’encontre de pratiques favorisant la sécurité et le bien-être de jeunes personnes trans, selon des intervenants, des parents et des ados.


L’interdiction d’implanter des toilettes mixtes en milieu scolaire a franchement étonné Élianne*, jeune femme trans de 18 ans. La position prise par le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, va selon elle directement à l’encontre d’un problème soulevé par des élèves de son ancienne école secondaire et d’une solution trouvée par la direction de cet établissement situé à Sherbrooke.

« L’une des deux salles de bains réservées aux filles a été transformée en salle de bains neutre », raconte-t-elle. Sa mise en place a été décidée dans la foulée d’une pétition d’élèves réclamant des lieux d’aisance neutres (ou mixtes, ou non genrés) qui comptait plusieurs dizaines de noms, c’est-à-dire bien plus que le nombre d’ados trans fréquentant cette école. L’endroit compte deux cabines de toilettes et deux lavabos accessibles à tous qu’Élianne fréquentait sans crainte, contrairement aux toilettes pour filles ou garçons.

Jacob, étudiant non binaire de 18 ans, n’avait pas cette option à son école secondaire du quartier Rosemont, à Montréal.

<< Comme je ne suis pas très masculin, je ne me sentais pas en sécurité dans la toilette des garçons. J’allais dans celle des filles, mais je me faisais regarder weird.>>


-Jacob, étudiant non binaire de 18 ans


Cet inconfort, Zest, garçon trans de 14 ans, le ressent tant dans la toilette des filles que dans celle des garçons à son école du centre de Montréal. « On dirait que je ne suis pas censé être là, dit-il. Comme ma transition n’est pas complétée, si je vais chez les garçons, j’ai peur qu’ils me prennent pour une fille. Je ne veux pas vivre une situation comme ça, alors je ne prends pas le risque. » Ce qui veut dire que, par crainte d’être intimidé, il évite souvent d’aller aux toilettes à l’école. Ce qui lui a causé des soucis de santé, précise sa mère Alysia Melnychuk.



PHOTO JOSIE DESMARAIS, LA PRESSE

Zest et sa mère, Alysia Melnychuk

Toilettes mixtes interdites

Parler d’accès aux toilettes peut sembler anecdotique. C’est loin d’être le cas pour de nombreuses personnes trans et non binaires, confirme Jorge Flores-Aranda, professeur à l’École de travail social de l’UQAM. « Beaucoup de ces personnes sont victimes de violence dans les toilettes », ajoute son collègue Martin Blais, professeur de sexologie à la même université. Le fait que cet endroit soit soustrait aux regards des adultes en fait notamment un lieu propice à l’intimidation dans les écoles, signalent plusieurs intervenants.

En milieu de semaine, la question des toilettes est devenue un sujet chaud à l’Assemblée nationale après qu’une école secondaire de l’Abitibi eut annoncé vouloir implanter des toilettes mixtes. Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a associé cette tendance à une idéologie portée par la « gauche radicale », comme l’écriture inclusive. Le ministre de l’Éducation, lui, a mis un stop à ce genre d’opération, s’inquiétant notamment que la proximité fasse en sorte que les garçons se moquent des filles qui ont leurs règles, et plaidant pour la mise en place d’un comité d’experts pour guider son ministère.

« Ça, ça m’a vraiment insultée », lance Geneviève Ste-Marie, mère de deux enfants trans de 15 et 18 ans, et coordonnatrice de l’organisme TransEstrie. « Il pense que tous nos enfants sont des cancres misogynes qui s’attaquent aux jeunes filles qui ont leurs menstruations ? Ben voyons ! On est en 2023 ! Et si on en est encore à se dire que les garçons rient encore des menstruations des filles, c’est peut-être qu’il y a un problème avec l’éducation sexuelle des enfants. »


PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Maël et sa mère, Geneviève Ste-Marie

Ce qui a choqué Élianne, c’est que la discussion se déroule en vase clos. « On n’a pas entendu une seule personne trans. Ils ne considèrent pas les voix des personnes trans », déplore la jeune femme, qui étudie désormais au cégep. Jacob juge quant à lui qu’on instrumentalise un groupe de personnes « qui veulent juste vivre leur vie comme les autres ».

Protéger qui ? De quoi ?

Jorge Flores-Aranda et Martin Blais relèvent que l’appropriation d’enjeux concernant les communautés trans par certains partis politiques est faite à des fins électoralistes. « Dans le cas du Parti conservateur [fédéral], c’est assez clair », souligne M. Blais.

Martin Blais constate aussi une forme de renversement de la responsabilité dans la façon dont le débat est posé.


PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Martin Blais

<< On fait reposer la menace sur les personnes trans, comme si elles représentaient une menace à la sécurité des personnes cisgenres et une atteinte à la pudeur. Martin Blais, professeur de sexologie à l’UQAM >>


L’une des craintes exprimées plus ou moins directement par certains parents, c’est que les toilettes mixtes facilitent les agressions perpétrées sur les filles cisgenres. « Ça, ça veut dire que les filles ne se sentent pas en sécurité quand il y a des gars autour », souligne Élianne, sous-entendant que cette crainte-là n’est pas fondée sur la présence de personnes trans. « Les directions d’école se préoccupent plus des réactions des parents des enfants cisgenres que de la sécurité des enfants trans, dénonce quant à elle Geneviève Ste-Marie. Ce qu’on demande aux élèves trans, c’est de prendre des moyens pour ne pas embêter les élèves cisgenres. »

Il n’existe pas de solution magique ni parfaite pour résoudre le problème « dans une société construite sur la binarité », estime Jacob. L’implantation de toilettes mixtes, non genrées donc, et accessibles à tous, semble toutefois une solution qui fait consensus ou presque parmi les intervenants et les ados interviewés. Ce type de lieux d’aisance est constitué d’un alignement de cabines fermées du sol au plafond et de lavabos accessibles à tous.

« Quand elles sont bien faites, les toilettes mixtes sont les plus sécuritaires et les plus intimes. Je pense que c’est un avantage pour tout le monde », estime Kim, intervenante à l’Aide aux trans du Québec. C’est la solution que choisirait Zest. « Je me sens plus à l’aise dans les toilettes mixtes, dit l’ado de 14 ans. Je ne sens pas que mon genre est un problème ou que je ne suis pas comme les autres. »

Martin Blais signale que ce genre d’installation n’a rien de nouveau et qu’il s’avère une option sécuritaire pour tous. « Des villes et des institutions ont mis sur pied des toilettes non genrées et on n’a pas vu le nombre d’agressions augmenter, dit-il, et la victimisation des personnes trans, elle, diminue dans des contextes comme ceux-là. »

*Seul le prénom de certaines personnes trans citées est utilisé pour préserver leur anonymat.


 

Commentaire de Samuel Desbiens, directeur général de Trans Mauricie/Centre-du-Québec à propos de cet article de La Presse.


Pour commencer, Messieurs les Ministres, tout comme pour n’importe quelle oppression systémique, il est important que les personnes en position de domination reconnaissent leur.s privilège.s. En tant que personnes cisgenres, c’est-à-dire s’identifiant au genre qui vous a été attribué à la naissance, nous êtes des personnes privilégiées dans une société cis-normée ; le fait d’être cisgenre est présenté comme la norme naturelle, universelle et légitime.


La transphobie ne se manifeste pas toujours explicitement avec des insultes ou de la violence physique : c’est une oppression systémique, qui peut donc être plus insidieuse et s’exprimer au quotidien dans notre monde fait pour les personnes cisgenres.


Essayez d'être plus conscient, Messieurs les Ministres, et vous commencerez à réaliser tout le travail que nous devons faire pour améliorer la situation des personnes trans qui n'ont pas accès à ces privilèges.


  • Vous pouvez utiliser les toilettes publiques sans craindre d'être ridiculisé, la violence verbale ou les menaces physiques .

  • Vous pouvez utiliser les installations publiques telles que les vestiaires des gymnases et les vestiaires des magasins sans être regardé , effrayé ou inquiet.

  • Les personnes un peu curieuses ne pensent pas pouvoir vous demander à quoi ressemblent vos organes génitaux et comment vous faites l' amour .

  • Votre validité en tant qu'homme/femme/humain ne repose pas sur votre apparence physique pour « passez » pour non-trans.

  • Vous pouvez circuler dans les rues sans être constamment regardé comme une curiosité ou pointé du doigt, entendre chuchoter.

  • Vous pouvez avoir accès à des activités pour les femmes par exemple et ne pas être exclu en raison de votre statut de femme trans.

  • Les gens vous appellent par votre prénom et ne vous demandent pas quel est votre nom de naissance pour ensuite se demander s'ils ont le droit de vous appeler par ce nouveau prénom.

  • Vous pouvez trouver un emploi, louer un appartement ou emprunter de l’argent sans craindre d’ être rejeté en raison de votre identité/ expression de genre .

  • Vous pouvez flirter, faire la cour ou nouer une relation sans craindre que votre statut biologique puisse être un motif de rejet ou d'attaque, et cela n'amènera pas non plus votre partenaire à remettre en question son orientation sexuelle.

  • Si vous vous retrouvez aux urgences , vous n'avez pas à craindre que votre sexe vous empêche de recevoir un traitement approprié ou que tous vos problèmes médicaux soient attribués à votre parcours de transition .

  • Vous n'avez pas à craindre d' être placé dans un centre de détention ou une prison ségréguée selon le sexe et qui ne correspond pas à votre identité.

  • Vous n'avez pas à craindre d' être refoulée d' un refuge pour femmes maltraitées parce que d'autres femmes croient que votre statut d'homme à la naissance fait de vous un prédateur sexuel .

  • Vous n'avez pas à vous soucier d' accéder à un refuge pour sans-abri car les travailleurs ne savent pas dans quel dortoir vous placer .

  • Vous n'avez pas à craindre d'être abordé dans la rue comme une travailleuse du sexe en raison de votre expression de genre.

  • Vous n’êtes pas obligé de subir une évaluation psychologique pour recevoir des soins médicaux de base.

  • Vous n’êtes pas obligé de défendre votre droit de faire partie de personnes « queer » (ou de la communauté queer), et les gais et les lesbiennes n’essaieront pas de vous exclure de « leur » mouvement pour l’égalité des droits en raison de votre identité de genre (ou de tout mouvement pour l’égalité). , y compris les droits féministes).

  • Si vous êtes assassiné (ou si un crime est commis contre vous), votre expression de genre ne sera pas utilisée pour justifier votre meurtre.

  • Les médias décrivent fidèlement les personnes cisgenres dans leurs articles et à la télévision sans faire de leur identité le centre d’ une histoire dramatique , d’un caprice ou d’une blague.

  • Vous pouvez supposer que toutes les personnes que vous rencontrerez comprendront votre identité et ne penseront pas que vous êtes confus, induit en erreur ou voué à l'enfer lorsque vous la leur révélerez.

  • Vous pouvez acheter des vêtements et porter des vêtements qui correspondent à votre identité de genre sans être ridiculisé.

  • Vous pouvez acheter des chaussures adaptées à votre sexe sans avoir à commander des tailles spéciales ou à demander à quelqu'un de les fabriquer sur mesure .

  • Aucun personne vérifiant votre carte d' identité ou votre permis de conduire ne vous insultera ou croira que vous êtes un imposteur parce que votre prénom ou votre sexe ne correspond pas à ce qu'il pense être votre expression de genre .

  • Vous pouvez raisonnablement supposer que les services d’un hôpital, d’une banque ou d’une autre institution ne vous seront pas refusés parce que le personnel ne croit pas que le marqueur de genre sur votre carte d’identité ne correspond pas à votre identité de genre.

  • Votre sexe est une option sur un formulaire.

  • Vous pouvez cocher une case sur un formulaire sans que quelqu’un croit que vous êtes un.e menteur.euse.

  • Vous n'avez pas à craindre les interactions avec les policiers en raison de votre identité de genre.

  • Vous pouvez aller dans des endroits sans avoir à planifier vos déplacements sachant qu'il y aura des toilettes que vous pourrez utiliser.

  • Vous n'avez pas besoin de convaincre vos parents de votre véritable sexe et/ou de gagner à nouveau l'amour et le respect de vos parents, de vos frères et sœurs et ami.e.s en raison de votre identité de genre.

Référence de la liste.


 

Samuel Desbiens, directeur général de Trans Mauricie/Centre-du-Québec croit que créer des espaces sécuritaires pour les personnes trans et non-binaires demeure un droit nécessaire qui se doit d’être défendue par les ministres de nos gouvernements.


Avant de faire l'objet de lois, les toilettes non genrées avaient fait leur apparition dans plusieurs établissements scolaires.

Voici un extrait d'article de La presse : Au Québec, le cégep de Sherbrooke est le précurseur. Du moins, chez les francophones. Le cégep du Vieux Montréal et le collège Dawson ont suivi. Et depuis, le collège Vanier, dans l'arrondissement de Saint-Laurent, compte une quinzaine de toilettes neutres. Mais c'est Concordia qui détient le record avec plus de 80 toilettes unisexes.

Publié le 17 mars 2016

SUZANNE COLPRON La Presse


Depuis 2015, au Québec, nous reconnaissons que l'auto-identification prime sur le sexe biologique. Par conséquent, si un élève demande un changement de genre autre que celui assigné à la naissance, l'école est tenue de respecter le choix de l'élève et de changer le prénom et la mention de genre sur tous les documents officiels.

Si l'étudiant a plus de 14 ans, l'autorisation parentale n'est même pas requise.


« Depuis sept ans, Trans Mauricie/Centre-du-Québec constate une augmentation du nombre de jeunes s'identifiant comme un genre différent.

Est-ce que c'est la mode ?

Non, les personnes trans et non binaires sortent du placard, car elles ont désormais l’espace pour en parler. Quand je rencontre un jeune au bureau, je l'entends souvent me dire : « Merci, je peux en parler à quelqu'un. Enfin! J'ai de l'aide" »


Lorsque les jeunes trans et non-binaires vont à l’école, la première demande est d’avoir accès à des toilettes non genrées.

Samuel nous raconte une tranche de vie : « Dans les années 70 période de mes études secondaires (mon expression de genre était visiblement masculine), je n'allais pas aux toilettes des garçons ou des filles dans mon école, ce qui m'exposait à des risques de violence.

J'avais donc dans mon sac à dos un gros pot en plastique qui servait de toilettes portatives.

Dans un coin privé de l'école, je pouvais aller aux toilettes, toujours dans la peur au ventre de me faire prendre les culottes baissées. Une expérience assez troublante à vivre, que je ne souhaite d'ailleurs pas à personne, Messieurs, Dames les Ministres »


Il est clair que certains partis politiques font des personnes trans une cible facile à des fins électorales et Trans Mauricie/Centre-du-Québec voient cela comme une grande menace pour préserver les droits des jeunes trans et non-binaires.

Vous croyez que notre société avance vers la progression pour des droits de la communauté trans, mais j'en doute quand je vois des politicien.ne.s utilisé les personnes trans encore trés vulnérables comme moyen d’accéder au pouvoir . Nos luttes ne doivent pas cesser pour préserver des droits durement acquis pour nos personnes concernées et c’est la mission de Trans Mauricie/Centre-du-Québec.


Extrait de l'article de Rania Massoud, Publié le 8 septembre à 4 h 00 HAE, Radio-Canada


Selon les conservateurs qui souvent utilisent des termes comme "contagion" ou "contamination" pour parler des trans. Ils accusent les personnes transgenres de vouloir recruter les enfants et de les convertir à l’idéologie de genres. Ces discours sont basés sur les émotions et non sur les faits. (extrait de l'article de Rania Massoud, Publié le 8 septembre à 4 h 00 HAE, Radio-Canada)


Que les choses soient clairs, Trans Mauricie/Centre-du-Québec, n'est pas un organisme qui pratique le recrutement des enfants pour les convertir en enfant trans. Chaque enfant que nous recevons dans nos bureaux est accompagné de son parents. Nous donnons du soutien et de l'informations sur les étapes de la transition et nous les référons vers un.e spécialiste de la santé qui déterminera si l'enfant est trans ou non. Sur la décision final du.des parents d'accompagnés leur enfant dans ses étapes de la transition repose sur eux seulement.


Trans Mauricie/Centre-du-Québec sensibilise les jeunes au respect des autres afin de faire un milieu scolaire sécuritaire pour tous. Chez trans Mauricie/Centre-du-Québec, aucun discours de nos intervenants vient inciter les enfants à être trans.


«Si j'avais le droit à un voeux, je souhaiterais que tout le monde puisse ressentir la douleur causée par la dysphorie de genre au moins une fois dans sa vie, mais la plupart n'en feront jamais l'expérience», affirme Samuel Desbiens. Essentiellement, tout ce que je demande aux politiciens, c’est d’avoir de l’empathie pour les jeunes personnes trans et non binaires et de comprendre qui elles sont.

Sachez simplement qu’elles essaient d’être elles-mêmes et aidez-les à trouver leur identité.»

»











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